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16/07/2010

BLAISE L'EMBOUSÉ

Le morceau précédent est ici.

Pour co, Éric, Marc et John.

...En pédalant vers les Grands Prés, Ginette a le sourire aux lèvres. Le patron n’a pas arnaqué : il a commencé avec fièvre à lui préparer le palais dont elle sera la princesse. Un nid petit mais très douillet. Elle en tournerait poétesse. Heureusement, elle n’en a ni le temps ni les capacités.
...
Elle appuie son vélo conte le mur près de la porte grande ouverte. « Bravo, le Bouseux ! Va encore y avoir une chiée de mouches dans la casbah ! » marmonne-t-elle ». En entrant, elle remarque des traînées brunes sur les marches et sur le pavement du corridor. L’endroit ne sent vraiment pas la rose. Elles conduisent à la cuisine dont la porte bée également. Là, Ginette découvre Blaise-le-Bouseux dans toute sa splendeur : avachi sur une chaise, le buste reposant sur la toile cirée de la grande table, il est brunâtre de la tête aux pieds et répand une odeur pestilentielle. Devant lui, un verre et une de ses bouteilles d’absinthe de contrebande presque vide. Se bouchant les narines d’une main, elle ouvre les deux fenêtres de la pièce de l’autre. D’un index répugné, elle appuie sur le bras de son patron.
...
« M’sieur Feronnard ? M’sieur Feronnard !
...
— Sale raclure… de siphon d’bidet… d’fils de pute… d’enculé au sel… »
...
Il n’a pas bougé, n’a pas ouvert les yeux. Seules ses lèvres ont remué. Ginette décide d’employer les grands moyens. Elle gagne la buanderie. Elle enlève son jeans et son chemisier, passe son tablier de travail et enfile ses gants de ménage. Elle revient vers le Bouseux avec un seau d’eau qu’elle lui verse sur la tête. Sous l’effet de la douche glacée, le remuglant ivrogne se lève, titube, se  retient au plan de travail.
...
«  Le déchet d’pourriture… de matrice… de salopard… de fausse couche de truie !
...
— Qu’est-ce qui s’est passé, m’sieur Feronnard ?
...
— C’est Flavien-la-Flatte ! Sont arrivés à trois… Cagoulés… En début d’soirée. Z’ont pas dit un mot… I’ m’ont attrapé et m’ont flanqué… dans la fosse à purin…
...
— Wow ! Vous avez r’connu quelqu’un malgré les cagoules ?
...
— Flavien-la-Flatte ! J’suis certain qu’c’est lui. À cause du pneu d’son John Deere !
...
— Bon, ben, c’est pas tout ça. Z’avez un tuyau d’arrosage ?
...
— Dans l’étable.
...
— Prenez l’seau, mettez vos vêtements d’dans et passez-vous un bon coup d’tuyau. J’m’occupe du reste. Et faudrait penser à terminer ma chambrette.
...
— Putain d’gueule de bois !
...
— R’prenez une rasade, ça va vous r’lancer. »
...Blaise attrape la bouteille et boit au goulot. L’effet produit n’est pas celui attendu : une immonde gerbe lui remonte de l’estomac et va asperger Ginette de haut en bas. Le Bouseux s’écroule dans ses épanchements. Ginette éclate en sanglots.

Commentaires

Tuyau pour tout l'monde ! :-)

Écrit par : co errante | 16/07/2010

Faut pas gaspiller l'eau, co !

Écrit par : Éric | 16/07/2010

Jouissif ! C'est qu'il est parfois attachant, ce vieux Blaise... de loin.

Écrit par : Marc Bonetto | 16/07/2010

De tout près, il colle !

Écrit par : Éric | 16/07/2010

Y a pas à dire, cette chronique champêtre, elle envoie !
Ça me rappelle deux gars de chez moi qui laissent des traces sur le bord de la petite route qui les mène chez eux le samedi soir, tard, avant de rentrer se coucher.
Le lendemain matin leur maman inspecte régulièrement les lieux pour les preuves, quand elles les trouvent ils se font avoiner sévère :)

Écrit par : Jean | 16/07/2010

Merci de votre passage, Jean.

Blaise-le-Bouseux est un saint à côté de l'inspecteur Maigros.

Écrit par : Éric | 17/07/2010

Les commentaires sont fermés.