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16/05/2022

Contre tous chacaux (extrait 2)

Voici une autre des quarante parodies moranesques rassemblées dans CONTRE TOUS CHACAUX. Pour découvrir les 38 autres, c'est ici : https://grostextes.fr/publication/contre-tous-chacaux/
Pour un exemplaire dédicacé, contactez-moi.

 L’HÉRITAGE DE L’OMBRE JAUNE (#63)

De l’ancien cloître de l’abbaye, jadis lieu de paix et de méditation, retentit un brame de cerf en rut. Selon les zoologues, certains brames ressemblent à des rots, d'autres à des cris longs, d'autres, plus saccadés, à des hurlements secs. Icelui sortait du gosier d’un homme en grand courroux.

— Non, non et non, commandant ! Vous me ferez pas gober que le mot ptyx existe !

— Bill, voyons, tu ne t’en souviens pas :

Sur les crédences au salon vide : nul ptyx

Aboli bibelot d'inanité sonore

— Quésaco encore, ce binzx ?

— Mallarmé, voyons, mon vieil ami, Mallarmé, le Maître !

— Votre mal armé n’a pas intérêt à se pointer ici, moi j’ai un Smith & Wesson Model 586 qui lui fera définitivement digérer ses crédences, ses ptyx et ses bibelots à la con !

— Paix, mon doux ami, paix. Morane quand il passait ses vacances dans l’abbaye dont il venait récemment de faire l’acquisition semblait parfois touché par on ne savait quelle grâce. Si tu t’irrites ainsi à tout, tu ne feras pas de vieux os.

— M’en contrefous, commandant ! Je ne m’imagine pas à la retraite. Je veux mourir dans la fleur de l’âge, mon Smith & Wesson Model 586 encore fumant en pogne ! À propos de retraite – le géant roux parut se calmer quelque peu – vous ne savez pas la dernière : ma sœur n°4 a fait retaper pour moi un petit cottage voisin de sa ferme dans les Highlands. « Pour ta retraite, mon Billounet ! » m’a-t-elle précisé. Vous vous rendez compte, commandant, en retraite, dans les Highlands, juste à côté de ma sœur n°4 : je serai obligé d’aller manger son haggis tous les dimanches midis et je vais vous dire deux trucs, commandant : primo j’ai toujours détesté le haggis et deuzio le haggis de ma sœur n°4 est le pire haggis de toute l’histoire de l’Écosse depuis l’époque des Normands.

— Écoute ça, Bill… Écoute…

— Bah, encore un cerf en rut qui rée, comme toujours en cette saison.

— Les cerfs ne réent pas en juillet. Écoute plus attentivement…

— …Shit! On dirait… le cri d’un dacoït qui s’est chopé une laryngite.

Morane sortit de dessous la table un antique Lefaucheux en état  de marche. Bill, moins prévoyant, n’avait pas son S&W, juste un lance-pierre en coudrier et chambre à air de vélo fabriqué la veille, et quelques cailloux. La raucité se fit à nouveau ouïr, plus proche. Bill catapulta dans la direction du son. Un blink lui fit comprendre qu’il avait éclaté l’un de ces petits objets rares auxquels le commandant tenait tant.

— Calme-toi, Bill. C’est moi, le nyctalope. Je le vois. Il approche. Il n’est pas armé et tient ses bras levés. Le voici.

Le dacoït apparut, limite anorexique, ne portant qu’un semblant de pagne à la mode de chez lui. Il rauqua une dernière fois, sortit de son ersatz de slip une enveloppe qu’il jeta au sol puis disparut. Morane s’approcha, lut sur le rectangle blanc : TESTAMENT DE M. MING.

— Touchez pas, commandant ! Faut appeler la brigade sanitaire ! Personne sait quels foutus virus ils trimballent dans leurs calebars, ces bestiaux.

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